2011-03-20

Stratagème n° 22 : refermer la porte de la maison sur les voleurs

Si l’on a seulement affaire à une poignée d’opposants, il faut sur-le-champ les cerner et les réduire.
Le Yijing dit : chute, ne pas laisser la moindre issue.

Il est indispensable de fermer toutes les portes et d’arrêter les voleurs, non pas à cause du danger qu’ils représentent, mais pour éviter qu’un autre camp ne leur donne refuge et ne les utilise contre nous. Cachez un seul homme prêt à mourir dans une vaste campagne et lancez-en mille à ses trousses. Vous verrez les poursuivants devenir aussi aveugles que des chouettes en plein jour et avancer à pas de loup. Pourquoi ? C’est qu’ils craignent tous de voir le fuyard surgir à un détour du chemin et leur faire un sort. On voit ainsi qu’un seul homme qui n’a plus rien à perdre suffit à en terrifier mille.
Une règles régit les poursuites : si les fuyards ont une chance de s’échapper, ils combattent jusqu’à la mort. Si toutes les issues leur sont coupées, ils se laissent arrêter. L’anéantissement immédiat des petits groupes d’opposants est un principe politique éprouvé et particulièrement aisé à mettre en pratique aux périodes où le pouvoir d’une dynastie est encore florissant. La règle d’or en la matière peut s’énoncer ainsi : tout phénomène est au début un germe, puis finit par devenir une réalité que chacun peut constater.
Le sage pense dans le long terme. C’est pourquoi il a grand soin de s’occuper des germes. La plupart des hommes ont la vue courte. C’est pourquoi ils attendent que le problème soit devenu évident pour s’y attaquer. Quand il est encore en germe, l’affaire est simple, exige peu d’efforts et apporte de grands résultats. Quand le problème est devenu évident, on s’épuise à le résoudre et, en général, tous ces efforts sont vains. Quand on marche sur le givre, la glace dure n’est pas loin.
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Selon la loi des Yin, celui qui jetait de la cendre dans la rue devait être dépecé. Confucius expliqua : ils savaient vraiment gouverner. Quand on jette de la cendre dans la rue, une escarbille pourrait fort bien entrer dans l’œil d’un passant. Le passant qui reçoit ainsi une escarbille dans l’œil se fâche. Celui qui se fâche se bat. Celui qui se bat entraîne toute sa famille dans l’affaire. C’est ainsi que l’on cause la perte de toute la famille. Voilà pourquoi un tel châtiment est nécessaire. Les châtiments terribles, les hommes en ont peur. Ne pas jeter de cendre dans la rue est une chose aisée. Faire faire aux hommes des choses faciles et leur faire ainsi éviter des châtiments qu’ils craignent, voici la juste manière de gouverner.
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La vertu de cet homme était célèbre dans l’empire. Il ne convient pas, à peine arrivé dans son fief, de mettre à mort les hommes capables qui y demeurent. Pourquoi l’avez-vous fait exécuter ? Taigong répondit : cet homme disait : « je ne sers pas mon roi et ne commerce pas avec les grands. Je laboure ma terre, bois l’eau de mon puits et ne demande rien à personne. » Il était à craindre que cet homme, par son exemple, sème le désordre et incite le peuple à ne pas obéi à la loi. Aussi est-il le premier que j’ai fait exécuter.
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Au cours des opérations militaires, le principe tactique qui consiste à ne pas laisser d’issue à l’adversaire est généralement de rigueur. Une force ennemie qui a subi un revers peut aisément, si on lui laisse une porte de sortie, se reconstituer un peu plus loin en ayant conservé une partie importante de sa puissance de feu.
En 1946, à a veille de la grande confrontation qui allait opposer l’armée rouge, rebaptisée Armée populaire, aux forces du Guomindang afin de décider de la possession de l’empire, Lin Biao, commandant en chef des forces communistes du Nord-est, mit au point le principe tactique dit : un point, deux faces. Cette pratique consistait à coupler une offensive concentrée sur un centre de gravité unique avec une manœuvre en tenaille sur deux faces convergentes afin de couper toute possibilité de retraite aux forces adverses qui se révélaient incapables de soutenir le choc.
Il développa ainsi ce concept : quand je dis « un point », c’est qu’il s’agit de concentrer une force militaire en situation avantageuse sur un point névralgique de l’offensive. La méthode évite d’éparpiller ses forces sur des points multiples. Quand je dis « deux faces », c’est qu’il convient, en même temps, de pratiquer une tactique d’encerclement pour éviter que ‘ennemi ne traverse nos lignes et ne s’échappe. Le nombre « deux » doit être compris comme un minimum. Trois ou quatre faces peuvent être organisées si l’on dispose des forces nécessaires. Diffuser un tel mot d’ordre doit avoir pour effet de pousser nos cadres à concentrer leurs forces principales sans hésitation sur un point unique et, d’autre part, de leur rappeler de toujours coupler l’offensive avec une manœuvre d’encerclement. La méthode démontra par la suite son efficacité et reçut le surnom imagé de tactique du marteau et des faucilles.

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