2011-03-20

Stratagème n° 04 : attendre tranquillement un ennemi qui s’épuise

Le rapport de forces – et non pas l’engagement ouvert – est à mettre à profit pour épuiser l’adversaire.
Le Yijing dit : le fort perd sa force, le faible la gagne.

Il s’agit de dominer une suite complexe à l’aide d’une action simple, de répondre à une volte-face de l’ennemi sans avoir à rien changer soi-même. De répondre à un bouleversement de la tactique adverse en apportant à la sienne propre une légère modification. De répondre à un mouvement sans soi-même faire de mouvement. De répondre à un mouvement de grande ampleur par un léger déplacement. Bref, de se mettre vis-à-vis de l’ennemi dans la position de l’axe qui gouverne la roue.
Deux petits bergers découvrirent sur leur chemin la tanière d’une louve. Celle-ci était absente et avait laissé seuls ses deux louveteaux. Les enfants s’emparèrent de ces deux proies sans défense et, avisant deux grands arbres situés assez loin l’un de l’autre, y grimpèrent. Quand la louve revint au gîte, elle s’aperçut que ses petits avaient disparu et donna tous les signes d’une vive inquiétude. L’un des enfants entreprit alors de tirer violemment les oreilles du louveteau qu’il portait dans ses bras. La petite bête poussa un hurlement déchirant. En entendant cet appel, la louve leva la tête, se rua au pied de l’arbre et tenta d’y monter, de toutes ses griffes et de toutes ses dents.
Le second berger à son tour se mit à tordre cruellement les pattes de sa victime. Un gémissement à fendre l’âme monta du second arbre. La louve dressa l’oreille et abandonna son premier petit pour courir au secours de l’autre. Mais, arrivée au pied de l’arbre, elle du se contenter de battre le tronc de ses pattes, sans pouvoir y monter. Le premier enfant se remit à torturer sa victime, puis le second à son tour, pendant que la louve courait en hurlant d’un arbre à l’autre. Ce manège dura longtemps. Au fur et à mesure, le trot de la louve se ralentissait, son hurlement se faisait plus sourd. Enfin, à bout de forces, elle s’abattit de tout son long sur le sol et ne bougea plus. Les deux petits bergers sautèrent de leur perchoir pour constater qu’elle était morte d’épuisement.
Quand l’ennemi avance, nous reculons. Quand l’ennemi fait halte, nous le harcelons. Quand l’ennemi s’épuise, nous le frappons. Quand l’ennemi recule, nous le poursuivons. La guerre de mouvement a pour but d’anéantir l’adversaire.
***
Si l’on se trouve au cours de négociations économiques en face d’un interlocuteur agressif qui cherche par tous les moyens à prouver sa supériorité et montre, sans la moindre fioriture, qu’il espère mener les négociations à la baguette, l’usage de la technique dite « attendre tranquillement que l’adversaire s’épuise » est de rigueur.
Il suffit de contourner, dès le début de la conversation, toutes ses exigences hautaines, de les laisser choir dans le vide et de l’entraîner en cercles. Ou encore, de poser en retour des conditions inacceptables et de s’y tenir. Mais il importe de s’exprimer toujours avec calme et de demeurer ferme tout en restant poli. Après avoir ainsi longuement procédé à diverses manœuvres d’usure (cette sorte de négociations peut durer plusieurs mois, voire plusieurs années), on verra peu à peu la vigueur de ce négociateur prétentieux décroître. Notre camp pourra alors passer à l’offensive.
Lorsque notre interlocuteur sera à bout de forces et à bout de nerfs, la tête bourdonnante et le cerveau au bord de l’explosion, nous entreprendrons d’exposer notre point de vue et de l’amener doucement à la raison jusqu’à ce qu’il se plie à la moindre de nos conditions. Mis il ne faut surtout pas, lorsque l’on pratique de la sorte, que le camp adverse éprouve la sensation de se heurter à un mur. Cela risquerait d’entraîner la rupture des négociations.

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